Rose – Pink Lady
Un début doux, léger, acoustique, le portrait d’une compteuse compulsive cadrant son quotidien, qui s’abandonne au refrain : « Je compte sur toi c’est plus fort que moi » … un terrain qui peut sembler familier à ceux qui se plongent en connaisseurs à la découverte du nouvel album de Rose. Mais bien vite les sonorités changent, des guitares plus rock viennent se glisser et Pink Lady s’amorce, un nouveau costume que Rose endosse pour ce quatrième chapitre. Si elle a beau mélanger les cocktails dans ce préambule, jamais ses idées exprimées ne semblent ensuite aussi claires.
Comme avant fait le bilan des années écoulées depuis sa fameuse Liste (« J’ai fait du chemin sans en faire vraiment (…) J’ai pris un destin qui en renfermait cent« ) et un cheminement personnel « j’ai voulu me connaître un mardi par semaine« , menant au renouveau exprimé dans Atone, interprété avec la voix déchirante d’un lent retour à la vie, et la sourde puissance touchante d’un nouveau souffle retrouvé.
Pink Lady raconte aussi l’ambivalence d’aimer et d’avoir du mal à le faire : « Selon les jours tu es l’homme de ma vie (…) et je te fais tant de promesses que je tiendrai selon les jours » ou de façon encore plus émouvante dans Pour être deux, où elle a mal en tandem et ne fait jamais assez de place pour les douleurs d’en face. Pour la première fois, un duo se glisse sur un de ses albums : Jean-Louis Murat lui renvoie ses mots en miroir, jouant avec une émotion poignante celui qui accepte avec un certain fatalisme ce recul : t’as pas trouvé mieux pour me dire adieu… Un duo finement écrit dont la phrase « j’ai pas dans les yeux le compas pour être deux » reste longtemps en tête…
Le couple et la vie ensemble sont ainsi au cœur des thèmes de cet album. Mais si Histoire idéale évoque la force des retrouvailles après les tempêtes, Séparément lance la piste d’une séparation nécessaire pour recolorer l’histoire.
Rose brouille également les pistes, en détournant le « je » pour le rendre plus fictif. Ce sont alors des portraits masculins qui se dessinent : celui d’un homme qui remet ses rêves à demain dans Partie remise ou celui qui quitte son foyer après la naissance de son enfant dans Maman est en bad. Une chanson au refrain à la musicalité étrangement joyeuse compte-tenu du fond, dans un contraste habile et réussi. Une composition signée Laurent Lamarca, qui fait partie des collaborateurs amis dont Rose s’est entourée pour certaines chansons, aux côtés de Loane, Medi et Auden, qui a également réalisé deux titres.
Pour orchestrer tout cela, Rose a fait appel au réalisateur Pierre Jaconelli et leur collaboration apparaît d’une évidence rare. Les chansons sont finement habillées, avec chacune une ampleur différente mais tout aussi forte. Ensemble, ils définissent une « variété rock », concept qui peut paraître flou, mais qui ne manquera pas de s’éclaircir à l’écoute de Je de société ou encore Séparément.
Pour clore l’album, Rose s’affranchit complètement, « mes mardis n’ont plus rien à vous dire aujourd’hui« , et c’est sur l’envolée planante et aérienne de Je ne viendrai pas demain que s’achève ce quatrième chapitre…
Si Et Puis Juin et la tournée qui en avait découlé comportaient déjà un renouveau musical, Pink Lady en est la continuité grandie. Et si Rose a souvent dit qu’elle « chantait Keren« , ce costume de Pink Lady est sans nul doute le chaînon qu’il lui manquait pour parfaire cette dualité et en faire en effet son album le plus abouti de tous.
Et, en vrai, il est magnifique.
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Pink Lady, à paraître le 15 juin chez Columbia/Sony
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